Le soin que Houphouët-Boigny portait autant à sa mise qu’à la teneur et au prononcé de ses propos s’est évanouit avec lui.
“La junte ” tripartite politique actuellement aux affaires à Abidjan ne lui arrivent pas à la cheville. Et ne n’est pas faute d’essayer pour Tidjane Thiam par exemple, qui joue un personnage de scène politique pour être Président. Le PDCI RDA a lui confié, semble trop grand pour lui.
En effet, le père de la nation en vrai chef africain avait dans les gènes du RDA semé les graines de l’Union Africaine. Mais il était aux prises avec des adversaires tant internes qu’externes. Toute son énergie fut donc consacrée à donner un visage concret à sa vision. Au soir de sa riche vie, le 07 décembre 1993, il laisse derrière lui un pays construit.
Mais un personnel politique diffus. Ses héritiers n’ont pu faire mieux. Lorsqu’arrive Laurent Gbagbo opposant historique, la parole se “libère” mais se délite aussi. On passe du soutenu au terre à terre et même au trivial.
Progressivement, il réussit à imposer la posture décontractée au pouvoir mais surtout délier la langue. Dans cette brèche, s’engouffre, un peuple composé de plus de 66 ethnies. La langue française est bien prise à partie et infiltrée de mots et d’expression du terroir. Le nouchi ainsi né se densifie. Le tour glaçant qu’il fait, injustement, dans les geôles de la Cour pénale internationale après son arrestation le 11 avril 2010, n’arrange pas le personnage.
Son retour tant attendu se présente inattendu. Le coup du maître. Gbagbo s’autorise sa “ Nady” en seconde épouse. Son âge désormais plus avancé lui permettant en Afrique, de se le permettre, il s’en donne à cœur joie. Contre toute attente, il rend hommage au ” fils d’Abla pokou”, la ” machette de Dieu” en entonnant en plein grand meeting ” Ma chérie est Kpata …” du défunt artiste.
Ma chérie est Kpata
Si Gbagbo a choisi son registre et s’y tient, en incorrigible opposant politique, ce qui inquiète c’est qu’il a fait des émules maladroits chez ses adversaires politiques notamment du Rassemblement des Houphouétistes pour la Paix (RHDP). Il y a moins d’une semaine, en effet Cissé Bacongo, tout Docteur en droit civil et Secrétaire Exécutif qu’il est, a cru nécessaire de rendre Gbagbo “antropologique”ment inapte à gouverner.
En face, la réplique dans son essence n’a pas été à la hauteur puisqu’elle s’est voulue réponse. A côté, Blé Goudé, le “fils” rejeté de Gbagbo, lui se réfugie dans les proverbes du terroir et négocie fort auprès d’Alassane Ouattara le dégel de ses avoirs.
Au RHDP, Touré Mamadou en baisse de forme, pense utile de promouvoir les réalisations du Président Ouattara, sans se rendre compte que celles-ci, éloquentes, se suffisent à elles même.
Lorsqu’ils ne se traitent pas de nom d’oiseaux, c’est les pugilats qui sont de mise et les fils d’Abengourou le Député Bredou Athanase et Guillaume Adom nous ont offert un spectacle des plus hideux le 18 avril dernier au siège local du PDCI RDA.
Savent-ils seulement qu’au même moment leur fils Kedjevara ‘ remue’ la bouteille de champagne pour fêter son anniversaire et les regarde en coin ?
Dans ce registre, il n’est point question de genre et la décence nous oblige à ne pas réveiller Mme la député pudiquement surnommée IBK. A ce jeu, la communication maîtrisée d’Alassane Ouattara tient le haut du pavé partageant au moins l’élégance et la mesure du Père fondateur. Mais après lui, comme après Houphouet-Boigny, les ivoiriens seront ils tenus de vivre longtemps cet insipide spectacle?
Tama César
POUVOIRS MAGAZINE
