Dans une déclaration sans détour, le capitaine Ibrahim Traoré, président de la transition au Burkina Faso, a dénoncé la culture du “deal” et la corruption politique en Afrique.
Il appelle à une refondation morale et critique au passage les pratiques politiques, les rapports entre États voisins et la situation de certains Burkinabè détenus en Côte d’Ivoire.
“Je ne vais pas être hypocrite. Les gens sont nés avec une mentalité. Si tu ne connais pas quelqu’un, tu ne peux pas évoluer. C’est ce qu’on appelle les deals”, a déclaré le capitaine Ibrahim Traoré. “Tout le monde a évolué avec cet esprit de deal, de corruption. C’est dangereux, mais c’est la politique qui a amené cela.”
Le chef de la transition burkinabè fustige ces “entrepreneurs politiques” qui, selon lui, ont perverti la notion même de service public.
“En Afrique, un politicien, c’est quelqu’un qui maîtrise l’art de mentir, de tromper, de flatter… bref, tous les vices. Si vous regroupez tous les vices, vous êtes un bon politicien. C’est la vérité.”
Avec son franc-parler habituel, Traoré regrette que, dans les villages, “lorsqu’une personne trompe les autres, on dise : celui-là, c’est un politicien”.
“Il faut que cette mentalité change.
Beaucoup ont déjà changé et marchent avec nous. Mais ceux qui veulent rester dans leur radicalisme ancien n’ont pas de place à nos côtés.”
Le capitaine affirme vouloir un État juste, où les citoyens bénéficient des infrastructures et des biens publics sans affiliation politique :
“Il faut cesser de penser que pour bénéficier d’une route, il faut appartenir à un parti. Non, tout le monde au Burkina doit bénéficier des fruits du travail du gouvernement.”
Abordant la question régionale, il évoque des tensions entre dirigeants de pays voisins, notamment en Côte d’Ivoire :
“Entre les dirigeants ivoiriens, ça ne va pas, il ne faut pas se mentir. Mais nos militaires, eux, coopèrent. Ils se rencontrent à la frontière et discutent.”
Ibrahim Traoré a également dénoncé la détention de Burkinabè en Côte d’Ivoire. Evoquant notamment “le décès d’Alino dans une prison non conventionnelle” et appelant au respect des droits humains pour tous. « Nous avons appris avec tristesse le décès d’Alino dans une prison non conventionnelle en Côte d’Ivoire. C’est inacceptable. Dans leurs prisons, il y a nos frères burkinabè — des civils, des commerçants — enfermés sans jugement. Nous espérions leur libération, mais c’est la mort d’un des nôtres que nous apprenons. Cela ne peut pas continuer ainsi entre pays frères »
FATEM CAMARA
photo:dr
POUVOIRS MAGAZINE
