Où est le feu de Tidjane Thiam ? « Je condamne, mais je n’affronte pas. »

4 semaines

Depuis plusieurs semaines, les militants du Front Commun se sont préparés, décidés à braver les interdictions et à affronter la brutalité d’un régime qui n’écoute plus que la matraque.

Ainsi, le samedi 11 octobre 2025, répondant à l’appel du Front Commun, des milliers d’Ivoiriens sont descendus pacifiquement dans la rue pour défendre une cause simple : la liberté, la justice et le droit d’exister politiquement.

Et pendant tout ce temps, alors que le courage populaire se déployait, le silence du chef du PDCI fut assourdissant.
Ni mot, ni communiqué, ni geste de sa part pour encourager ou galvaniser les troupes, afin de rendre cette lutte pacifique irréversible.

Finalement, Tidjane Thiam a pris la parole ce lundi 13 octobre 2025, dans une émission soigneusement formatée. Mais pour dire quoi ? Des constructions attendues, une indignation lisse, une condamnation sans âme.
Il a déploré l’image écornée de notre pays. Le service minimum, quoi !

Oui, il a dénoncé les violences, rappelé la philosophie houphouëtiste, évoqué sa confiance en l’avenir.
Mais aucun mot d’ordre, aucune perspective, aucun souffle. Nada !

Il a bien eu quelques mots pour les personnes arrêtées, certes, mais rien, spécifiquement, pour ces cadres centraux et régionaux, ces collaborateurs du parti qui, sur le terrain, subissent intimidations et arrestations.
Aucune parole forte de réconfort pour ceux qui tiennent encore debout le flambeau du PDCI, payant de leur personne et de leurs biens, pendant que d’autres, tapis dans le confort de la prudence, s’en remettent au hasard des jours meilleurs… ou rejoignent le RHDP.
Notre chef joue-t-il vraiment en équipe ? En tout cas, bien souvent, il oublie de le démontrer.

Un discours de constat, pas de combat

Le message explicite du président du PDCI se voulait un appel au respect des règles du jeu et à la fidélité à l’esprit d’Houphouët-Boigny.
Mais le message implicite, celui que retiendront militants et observateurs, est tout autre : une parole morale, pas politique. Une indignation, pas une orientation.

Le ton était feutré, presque administratif — comme celui d’un bon banquier — comme s’il voulait rester au-dessus de la mêlée.
Mais à force de bien parler sans galvaniser, il semble de plus en plus déconnecté du terrain.
En évitant tout mot d’ordre, il paraît craintif, comme s’il redoutait d’assumer pleinement le leadership d’un parti d’opposition sous pression.

Il parle de confiance et d’avenir, mais sans en tracer la route.
Et ce silence sur les hauts cadres traqués, auditionnés, intimidés, laisse transparaître une distance inquiétante.
Un chef, dans ces moments-là, doit incarner le front collectif, pas la neutralité diplomatique.

Le PDCI n’a jamais été un parti d’attentistes

Sous Houphouët, sous Bédié, dans les heures sombres comme dans les victoires, il y a toujours eu une parole de direction, un cap, une flamme.
Aujourd’hui, cette flamme vacille, non parce que les militants doutent, mais parce que leur leader peine à parler à leur cœur — et il ne le fait pas au moment où il le faut.

L’homme d’État qu’est Tidjane Thiam semble craindre la confrontation, alors même que ses militants la vivent chaque jour.
Il veut apaiser, mais la paix sans justice n’est qu’une trêve de façade.

Un chef ne peut pas être seulement sage

Un chef n’est pas seulement un homme de mesure ; il doit aussi être ardent et solidaire.
La tempérance n’a de sens que si elle s’accompagne de courage. Et l’intelligence politique n’est pas dans la fuite du combat, mais dans sa maîtrise.

Laurent Gbagbo, en son temps et encore aujourd’hui, a montré ce que signifie parler à la base, prendre des coups, mais tenir debout.
Le contraste est saisissant : Thiam calcule là où il faudrait incarner.

Alors oui, avons-nous tort de nous interroger ?
Où est la combativité de Tidjane Thiam ?
Devons-nous nous résoudre à croire ceux qui disent qu’il est juste un animal de ville, voire de Cocody ? Brillant, mais peureux ?

Pourquoi ce mutisme à la veille de la grande marche du 11 octobre, quand la base attendait sa voix, son regard, son souffle ?
Craignait-il d’assumer les probabilités du risque politique ?

En ces temps qui tanguent, le PDCI a besoin d’un capitaine, pas d’un commentateur

Du stratège Tidjane Thiam, certes, mais aussi d’un combattant.

Le courage de parler quand il le faut

La dignité du banquier et de l’homme d’État n’exclut pas la vigueur.
La modération n’interdit pas la conviction agissante.
Et l’héritier d’Houphouët-Boigny ne peut pas, en ces heures critiques, se réfugier dans la bienséance diplomatique pendant que les siens tiennent tête à la répression.

L’histoire retiendra les noms de ceux qui auront eu le courage de parler quand il le fallait, et non quand il était sûr de le faire.
Car la Côte d’Ivoire majoritaire qui veut l’alternance, elle, n’attend pas un service minimum.
Elle attend des actes, des mots vrais et un leadership à la hauteur du moment critique.

Kouassi Adjoumani

Cadre Thiamiste du PDCI-RDA

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