6 octobre: Bernard Yago, il serait allé au delà de l’homélie

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Premier cardinal ivoirien, figure de foi et de droiture, Bernard Yago incarne une voix pastorale ferme, engagée pour la paix et la justice.

Il y a vingt-huit ans, la Côte d’Ivoire perdait Bernard Yago, premier cardinal ivoirien, pasteur lucide et voix prophétique.
Né en 1916 à Pass, il devint prêtre en 1947 et mena un long ministère d’engagement au service de l’Église.
Son parcours débuta dans l’enseignement religieux à Bingerville, formant des générations de clercs dans la rigueur, l’humilité et la persévérance pastorale.
Nommé archevêque d’Abidjan en 1960, il dirigea l’Église durant trente-cinq ans avec autorité morale et intelligence spirituelle remarquables.
Créé cardinal en 1983 par Jean-Paul II, il fut un artisan discret mais déterminé du dialogue et de la paix.
Il dénonçait la corruption devant les puissants, au cœur même de l’État, avec des homélies percutantes et un ton toujours sans concession.
Durant les messes du 31 décembre, il exhortait gouvernants et fidèles à plus de justice, de transparence et de solidarité nationale.


Il accueillit en 1990 Jean-Paul II à Yamoussoukro pour la consécration d’une basilique qu’il jugeait pourtant trop ostentatoire.


Homme cultivé, il obtint une licence à Paris et créa l’Institut Catholique d’Afrique Francophone pour former l’élite ecclésiale locale.
Sous sa conduite, la cathédrale du Saint-Esprit vit le jour à Abidjan, symbole d’une Église ivoirienne forte et enracinée.


Il ne craignait ni la solitude ni le pouvoir, préférant la vérité évangélique aux compromis et la justice aux privilèges cléricaux.
Sa voix s’élevait pour les sans-voix, les prisonniers, les oubliés du système, même quand cela dérangeait les autorités politiques.


À plusieurs reprises, il exigea des comptes à Houphouët, interpellant le régime sur les injustices et les morts suspectes en prison.
Aujourd’hui, face aux tensions politiques, il ne se serait pas contenté d’une homélie : il aurait parlé directement aux dirigeants.
Il aurait appelé à l’apaisement, au dialogue sincère, à la réconciliation nationale pour éviter toute nouvelle dérive irréversible.
Engagé, il aurait sans doute pris la parole publiquement, sans filtre, pour désamorcer les crispations menaçant la paix sociale.


Son héritage dépasse l’Église : il fut une conscience nationale, un repère moral dans une époque de mutations et d’incertitudes.

« Passionné de Dieu et de l’homme » est le livre que lui a consacré Le journaliste Léon Lebry Francis.


Le 6 octobre marque chaque année ce départ, rappelant l’urgence d’un leadership fondé sur la foi, le courage et l’éthique.
Aujourd’hui encore, croyants et citoyens saluent la mémoire d’un homme droit, modeste, fidèle à sa mission jusqu’à son dernier souffle.

FATEM CAMARA

photo:dr

POUVOIRS MAGAZINE

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