Derrière la façade démocratique du parrainage citoyen, se cache un mécanisme de sélection redoutable. Entre pressions administratives, peur des représailles et obstacles techniques, le Dr Agoubli révèle les failles d’un système conçu, selon lui, pour écarter les candidatures gênantes dès le départ.
À tous mes amis qui vont se confronter au parrainage dit citoyen, je crois devoir vous prévenir de l’épreuve que c’est eu égard à mon expérience d’il y a 5 ans.
Il y a dans ce filtre, appelé parrainage citoyen, 3 éléments fondamentaux recherchés par l’organe électoral :
1/ le numéro de la carte d’identité
2/ le numéro de la carte d’électeur
3/ la signature du parrain
(Les autres éléments d’identité du parrain (nom, prénoms, etc.) allant de soi, la feuille de parrainage n’étant pas anonyme naturellement).
En évoluant en 2020, on s’est rendu compte que le seul élément distinctif et probant était le numéro de la carte d’identité. Cela se justifie par le fait que :
1/ le numéro de la carte d’électeur est public puisqu’il figure sur la liste électorale dont tout le monde peut disposer a priori ;
2/ beaucoup de nos concitoyens non alphabétisés ne savent pas écrire donc ne peuvent pas signer. (Une fiche de parrainage sans signature était valable ; elle était valable aussi si on avait mis une croix à la place de la signature).
En 2020 donc, l’élément que la CEI prenait en compte était le numéro de la carte nationale d’identité. Qu’est-ce que cela signifie dans un pays où l’administration (il suffit de voir le corps préfectoral ) est vendue au régime ? Eh bien, celui qui contrôle l’ONECI, contrôle le parrainage.
Par conséquent et selon que le code électoral dispose qu’un électeur ne peut parrainer qu’un candidat, dès que le RHDP aura déposé sa liste de parrains (et croyez moi, personne ne peut finir avant le RHDP) toutes les autres listes peuvent tomber pour cause de doublon.
C’est ce qui est arrivé à Mamadou Koulibaly en 2020.
On lui a découvert des doublons imaginaires à la CEI et au Conseil Constitutionnel qui du reste ne dispose d’aucun matériel, d’aucune expertise pour ce faire.
À cette difficulté de départ s’ajoute :
1/ le nombre de parrains demandé et qui a été renforcé par une ordonnance le 7 mai ;
2/ la difficulté de l’enregistrement numérique (à Lider, nous avons recruté des bénévoles mais ça n’a pas suffi. Pour finir, tous les cadres du parti ont veillé au siège pour faire les enregistrements. Malgré cela on n’a pas pu entrer les parrainages du Sud-Comoé et du Haut-Sassandra qu’on a dû laisser de côté )
3/ la peur des Ivoiriens. Je me souviens encore des gens qui appelaient pour parrainer et qui refusaient de s’identifier par crainte de représailles. Même dans les villages, les gens hésitaient à s’enregistrer ou bien, ils vous éconduisaient.
J’écoute et je lis avec beaucoup d’amusement les gens qui croient faire mieux parce que ceux qui s’y sont déjà frottés n’étaient pas à la hauteur. Et je leur dis que ce système ne poursuit aucun autre but que de se choisir ses adversaires. En y allant, il faut avoir à l’esprit de ne pas irriter sur le chemin le parti-État pour qu’il n’ait pas la tentation de vous éliminer purement et simplement si vous arrivez à passer tous ces obstacles. Si vous y arrivez.
Honnêtement, je suis sceptique devant la capacité des candidats indépendants à surmonter l’épreuve. Même pour certains partis politiques j’ai des doutes.
Bon courage !
AGOUBLI PAUL HERVE
photo:dr le titre est de la rédaction
POUVOIRS MAGAZINE