Guerre Billon-Thiam: le Pdci, cette crème qui fond…

2 mois

Jean-Louis Billon l’a dit : « Je suis candidat à la présidentielle. Je suis candidat pour le Pdci ». Il l’a dit dans une salle où se trouvait Valérie Yapo qui porte Thiam en horreur.

Tout s’explique désormais et on comprend mieux.
Jusque-là, rien d’étonnant. Sauf que l’homme refuse de reconnaître pleinement Tidjane Thiam, président légalement élu du PDCI, comme son chef. Pire : il a qualifié de boys et de ropéros les cadres fidèles à ce dernier.
Les vieux y compris. Et pourtant, c’est bien au nom de cette maison verte qu’il prétend briguer la magistrature suprême. C’est à la fois saisissant… et inquiétant.
Ce paradoxe – se réclamer d’un parti tout en rejetant son autorité légitime – dépasse la simple rivalité interne. Il interroge sur la nature de l’engagement politique aujourd’hui. Sur la valeur des règles collectives, et sur le respect dû à une institution comme le Parti démocratique de Côte d’Ivoire, qui a forgé des générations de leaders (Mockey Jean Baptiste, Célestine Ouezzin Coulibaly, Anne Marie Raggy…) dans l’ordre et dans la discipline.

Comment Billon peut-il prétendre incarner une alternative crédible s’il foule aux pieds les fondations même du parti qu’il représente ? Peut-on parler de légitimité lorsqu’on conteste, en parole et en acte, les choix issus d’un congrès souverain ? À quoi bon construire un projet présidentiel si c’est sur les ruines de la cohésion militante ?

Ce qui est en jeu ici n’est pas seulement un différend personnel entre deux bourgeois nés du bon vouloir de Félix Houphouët-Boigny : Thiam & Billon.

Ce qui est en jeu, c’est une conception de la politique.

Celle de Billon qui tient aussi à mettre fin à une dynastie « baoulé » semble s’être affranchie des règles du jeu démocratique interne, pour épouser les contours plus souples – et plus flous – de l’aventure individuelle. Ce faisant, il affaiblit la lisibilité du PDCI, désoriente la base, et offre aux adversaires politiques qui doivent s’en réjouir un spectacle désolant de désunion. Il offre aux plus jeunes, un spectacle de violence jouée, inhérente au rap. On comprend mieux sa proximité avec Didi B. Suspect 95.

La violence verbale qu’il réserve aux proches de Thiam n’est pas anodine. Elle marque une rupture nette avec la tradition de respect, de dialogue et de débat qui a longtemps été la marque de fabrique du PDCI. Quand on réduit ses camarades à des rôles subalternes, on ne cherche pas à convaincre, on cherche à écraser. On ne débat plus : on dénigre. On offense et rabaisse. Et cela dit tout du mépris sous-jacent pour le fonctionnement démocratique du parti.

Billon semble vouloir incarner le PDCI… sans le PDCI de Thiam. Il veut être le visage du parti, sans respecter le cadre qui le porte. En politique, ce genre de position est périlleux. Elle fragilise non seulement le parti, mais aussi la figure du candidat lui-même. Car si l’on ne respecte pas ses propres règles, pourquoi les électeurs devraient-ils croire à celles que l’on prétendra imposer demain à l’État ?

Les Ivoiriens ne croiront pas en ses choix.

Face à lui, Tidjane Thiam, élu avec un mandat, reste concentré sur la réorganisation du parti et la mise en ordre des structures. Il n’a pas réagi avec fracas aux provocations. Thiam ne dit rien et cela ne dit rien à Billon. Il laisse à chacun le soin d’observer. Et ce que l’on observe, c’est qu’en contestant la légitimité du président, Billon n’ouvre pas un débat : il s’inscrit en dissidence. Une dissidence de plus en plus visible.

La vraie question est donc là : que reste-t-il d’un parti lorsque ses propres cadres en contestent l’autorité élue, tout en s’en réclamant ? Jusqu’où peut aller une ambition personnelle lorsqu’elle piétine l’édifice collectif ? Et à quoi bon militer, bâtir, voter, si au final le respect du choix démocratique n’est qu’optionnel ? Le Pdci ressemble à une crème qui fond.
Le PDCI, ce n’est pas un simple label électoral. C’est une histoire, une vision, une organisation. S’y inscrire, c’est accepter une discipline. Union- discipline-travail. Était-ce une devise? S’y inscrire c’est accepter un chemin commun, un cap défini ensemble. Ceux qui refusent ce cadre peuvent choisir d’autres routes. Mais s’en revendiquer tout en saccageant la maison, c’est jouer double jeu. Et en politique, ce jeu-là finit rarement bien.
ALEX KIPRE

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