Aujourd’hui, le 5 novembre, la rédaction de Pouvoirs Magazine souhaite un joyeux anniversaire à Waipa Saberty, un monument de la musique ivoirienne.
L’histoire de Waipa est indissociable de la culture musicale d’Abidjan et de l’Afrique toute entière. Ce n’est pas un secret : Alpha Blondy et la galaxie reggae est un ouvrage qui, lors de sa dédicace, avait offert au public du Palais de la culture une anecdote marquante.
Lors d’une tournée en 1988 à Minneapolis, Waipa s’est substitué à Alpha Blondy, alors malade. Il a chanté deux heures durant tout le répertoire de l’artiste, sans que le public ne se doute de rien. Ce moment, raconté par Jagger, a révélé l’ampleur de la complicité et de l’admiration qui unissaient les deux artistes.
Waipa, avec son imposant physique et sa voix puissante, se distingue sur scène, mais il incarne aussi une diversité musicale profonde. Sa voix, qui a su reprendre le style de Third World avec une aisance impressionnante, trouve ses racines dans l’école de Motown. Ses influences vont de Teddy Pendergrass à Marvin Gaye, en passant par Otis Redding et James Brown, mais son style reste indéfectiblement attaché aux sonorités africaines. Il a réinterprété, avec brio, des classiques comme Anouhoume de Bailly Spinto et Zadi Bobo d’Ernesto Djédjé, insérant subtilement des accents reggae, funk et même des touches d’anglais, prouvant sa polyvalence musicale.
Au service de la musique
Waipa Saberty, né Bertin Sahui Waikapa le 5 novembre 1947, a grandi dans un environnement familial modeste. Avec un père agent de maîtrise aux Postes et Télécommunications et une mère, Koudouho Marcelline. Très jeune, il est plongé dans l’univers des chants chrétiens à l’école Saint-Jean Bosco. Il Y développe une véritable passion pour la musique. Adolescent, il rejoint le groupe Sélection Groupe aux côtés de David Wayou, avant de faire ses premiers pas dans l’orchestre de la RTI. Un vivier musical où il côtoiera des légendes comme Adjoukrou Jeanne Agnimel, Abbey Nayanka Bell, et Paul Nemlin.
Waipa, dès son plus jeune âge, montre une maîtrise vocale impressionnante. Notamment à travers sa participation aux chœurs de l’orchestre national. Une formation qui lui permet de s’imprégner de divers styles musicaux allant de la pop à la funk. C’est grâce à cette polyvalence qu’il devient le coach vocal d’Alpha Blondy lors de la création de son premier album Jah Glory. C’est aussi lui qui, par son influence, intègre le groupe The Natty Rebels. Marquant son entrée dans le monde du reggae. Très vite, Waipa s’impose comme une figure incontournable, avec une capacité à s’adapter à divers styles. Tout en restant fidèle à ses racines musicales.
Une voix qui transcende les générations
Loin des paillettes et des feux de la rampe, Waipa reste un homme de conviction. Il n’a jamais cherché à être une star, préférant se concentrer sur l’essentiel : la musique et son évolution. À 70 ans passés, l’artiste reste un exemple pour la jeune génération, avec une vision claire de son rôle dans l’industrie musicale ivoirienne. Son expérience, acquise au fil des décennies passées aux côtés des plus grands, est désormais mise au service des jeunes talents.
En effet, Waipa Saberty est aujourd’hui à la tête d’un projet ambitieux : un centre de formation musicale de 600 m², situé dans le quartier d’Abobo-Baoulé. Ce centre a pour vocation de former les artistes dans tous les domaines liés à la musique. Des chanteurs aux instrumentistes, des techniciens du son aux gestionnaires de productions musicales. Waipa souhaite offrir à ces jeunes les outils nécessaires pour réussir dans un secteur où la formation est souvent négligée.
Dans ce centre, l’accent sera mis sur la professionnalisation des métiers de la musique. Permettant aux artistes de comprendre comment gérer leur carrière, de la production à la vente de leur talent. « L’art s’apprend« , explique-t-il avec passion. « Je veux que mes petits frères ne végètent plus, qu’ils sachent comment se vendre et monnayer leur talent ». Un projet ambitieux qui, espère-t-il, contribuera à moderniser le paysage musical ivoirien et à créer une nouvelle génération d’artistes bien formés et autonomes.
Un héritage musical à célébrer
Loin de se laisser envahir par l’usure du temps, Waipa continue de nourrir sa passion pour la musique tout en mettant son savoir au service des autres. Au travers de son parcours, il incarne un modèle de persévérance et de travail. Il a côtoyé des légendes comme Fela Kuti et Rita Marley, et a participé à l’essor du reggae en Afrique. Mais son message est clair : « L’art ne se fait pas à la légère. Il se fait avec de la rigueur, du travail, et une vision. »
Ainsi, son anniversaire n’est pas seulement l’occasion de célébrer un homme et une carrière ; c’est aussi un moment de gratitude envers celui qui, avec humilité, continue de donner sans compter. Sa contribution à la musique ivoirienne, et plus largement à la scène musicale mondiale, est immense. Et comme le dit si bien l’artiste, « l’utopie et l’audace paient toujours en art ». Cette audace, il l’a incarnée toute sa vie, et il continue de l’incarner, avec un projet de formation qui sera sans doute l’un des legs les plus précieux de sa carrière.
Bonne fête, Waipa Saberty ! Que ton œuvre continue d’inspirer les générations futures.
ALEX KIPRE
photo:dr
POUVOIRS MAGAZINE
