Le Pdg du Groupe Sunu est décédé aujourd’hui 12 janvier à Paris. Que le tout-puissant accorde son infinie miséricorde à ce grand homme qui avait soutenu le festival “Abidjan perle des lumières” à la faveur duquel il nous avait accordé une interview que nous exhumons pour le lectorat.
Pendant 3 ans, vous avez soutenu le festival « Abidjan perle de lumières » et votre engagement arrive, cette année 2013, à son terme. Allez-vous le renouveler ?
L’investissement est lourd.
Pouvons nous avoir une estimation ?
On ne va pas parler de chiffres. Retenez que le groupe Sunu souhaite continuer, mais en étant accompagné par d’autres entreprises sur le marché. Cette année, nous pouvons enregistrer l’arrivée de Mtn. L’année dernière, nous avions la Lonaci et Petroci. Si nous agrégeons nos compétences, la Côte d’Ivoire parviendra à sanctuariser définitivement cet évènement. C’est à cette condition que le groupe Sunu continuera de participer. Nous voulons amener d’autres entreprises à adhérer à ce projet et devenir sponsor parmi tant d’autres sponsors. L’exclusivité ne nous intéresse pas. Une chose est sûre, on n’a plus le droit d’arrêter ce festival. Ce n’est pas possible. Il fait désormais partie du cachet et du sceau de la ville d’Abidjan.
Voici 3 ans que votre coopération avec la société Apotéoz, qui coordonne le tout, dure. Peut-on dresser un bilan partiel?
L’organisation de ce type d’événements ne relève pas de notre compétence. Ce n’est pas notre métier. Nous avons donc confié la maîtrise d’œuvre à une société ivoirienne Apoteoz, dirigée par M. Dao Mamadou. Je dois vous confesser que c’est à notre très grande satisfaction qu’il a organisé chacun des festivals ces trois dernières années. C’est grâce à leurs rendements, leurs professionnalismes (son équipe et lui) que nous allons continuer et prolonger la coopération avec cette société en qui nous avons pleinement confiance. Apotéoz commence à fédérer les autres sociétés qui veulent bien entrer dans le sponsoring.
Pour qui faites-vous le festival, réellement ?
Je le fais pour les Ivoiriens, pour la Côte d’Ivoire. Je ne fais pas de politique, j’aime ce pays comme j’aime le mien. J’ai commencé par le faire ici à Abidjan, et je ne l’ai jamais fait au Sénégal même si j’envisage d’aider la ville de Dakar.
Vous avez tout de même une société ici.
C’est vrai que j’ai une société qui travaille ici. Mais nous sommes présents dans onze pays africains, et la Côte d’Ivoire est le principal marché. Il ne faut pas le nier “Abidjan Perle des lumières” a permis de donner une visibilité aux filiales du groupe Sunu. Nous avons des sociétés principales (Ndlr : Ua vie, Lmai). Mais, c’est plus par amour et pour apporter notre contribution à la paix. Qui ne souhaite pas la paix ? Quand il y a la paix, tout le monde peut se retrouver et travailler. C’est vraiment la petite pierre que nous apportons à l’édifice, sans calcul, sans intérêt, de la manière, vraiment, la plus désintéressée. Je vous prie de me croire. Nous avons voulu offrir à la Côte d’Ivoire, de la joie, du bonheur sans rien attendre en retour.
Les mauvaises langues peuvent y voir autre chose.
Vous avez bien dit les mauvaises langues. Si quelqu’un y voit autre chose, c’est qu’il a l’esprit malin (Ndlr : malin tire son origine de Malignus qui signifie méchant). Ce qui m’habitait, c’est la sincérité d’apporter quelque chose au peuple ivoirien et il faut le reconnaître, les pouvoirs publics ont adhéré à ce projet, ils nous ont aidé sur toute la ligne. Toutes les entreprises sont concernées, la Cie, les administrations, la douane, le Fisc, tout le monde nous a accompagné dans ce projet, parce qu’ils ont vu qu’on n’en attendait aucun lucre. L’objectif ce n’était pas de vendre ou acheter quoi que ce soit ; c’était de faire plaisir aux Ivoiriens.
L’an dernier, malheureusement, un incident est intervenu…
J’allais y arriver. Je saisis cette occasion pour revenir sur cet événement malheureux : le décès de quelques participants. Le groupe est allé rendre visite aux familles des victimes. Et j’ai demandé à M. Mohamed Bah (Ndlr : son collaborateur) de les accompagner, soutenir matériellement et d’aider ces familles. Nous n’attendons aucun retour, Je suis sincère et vous prie de me croire.
Pouvez-vous nous raconter votre parcours et nous expliquer pourquoi vous êtes aussi viscéralement attaché à la Côte d’Ivoire ?
Je suis arrivé en Côte d’Ivoire en 1980 pour créer Colina Assurance. J’ai été embauché par l’Uap qui m’a porté à la tête de la zone Afrique dont je suis devenu le Directeur. Le groupe Axa ayant repris l’Uap, j’ai progressivement dirigé les filiales d’Axa en Afrique, et c’est ainsi que le groupe Sunu est né. Dans l’intervalle, mon ami et frère Jean Diagou avec qui j’avais travaillé à l’Union africaine, a créé Nsia. Donc à proprement parler, Jean Diagou et moi sommes les deux créateurs de véritables groupes africains d’assurance.
Que pèse le groupe Sunu ?
Au moment où je vous parle, le groupe Sunu est implanté dans 12 pays avec 18 compagnies d’assurance. Nous bouclons l’exercice 2013 avec un chiffre d’affaires de 90 milliards de Fcfa, et nous gérons plus de 250 milliards d’actif.
Quel bénéfice faites-vous ?
Nous faisons un bénéfice de 6 milliards. Mais vous imaginez bien que pour construire tout cela, il a fallu s’endetter. Notre objectif premier est donc de nous désendetter. Et depuis 15 ans, c’est ce que nous faisons. Et si Dieu nous prête longue vie, à partir de l’année prochaine, on aura remboursé la totalité de notre endettement. Et comme je vous le disais, l’attachement que j’ai pour la Côte d’Ivoire, bien que je sois originaire du Sénégal, mon pays de naissance, je n’y ai jamais travaillé. En dehors de quelques cinq années passées dans la coopération au Tchad, la Côte d’Ivoire est le premier pays africain où j’ai eu à exercer dans le domaine des assurances.
C’est ce qui vous a donc poussé à soutenir le pays meurtri.
Les événements qui ont meurtri le pays m’ont touché profondément, et quand les choses se sont calmées, je me suis demandé ce que je pouvais faire pour ce pays, pour que les Ivoiriens s’évadent, oublient tous les soucis. Un ami m’a fait la proposition, d’illuminer les grandes villes en sollicitant les expertises d’une entreprise portugaise spécialisée en la matière. Après notre première rencontre, je me suis décidé, convaincu que j’étais, et nous avons soumis le projet au pouvoir public. Le maire du Plateau, le Gouverneur du district l’ont immédiatement validé. C’est pourquoi je me suis engagé pour une durée de 3 ans.
A quoi renvoie désormais le mot « Lumière »dans votre esprit ?
Quand la lumière arrive quelque part, tout est éclairé, transparent rayonnant. A l’opposé, vous savez ce que représentent les ténèbres. Dans les écrits, à chaque fois que nous aspirons à quelque chose, c’est pour aller de l’ombre à la lumière. Quand on illumine la ville pendant un mois, les esprits s’évadent, les gens regagnent de l’espoir, il se crée un climat de convivialité, de fraternité. Même si ce n’est que pendant un mois qu’ils vont fraterniser, ça mérite l’investissement que nous avons consenti.
N’y a-t-il pas un aspect spirituel ?
Voilà, vous complétez ce que je viens de dire. On a illuminé la Cathédrale, la Mosquée et tout cela, parce que nous voulons que ce soit, au mépris des divergences, toute la communauté nationale de Côte d’Ivoire qui adhère et participe à cet évènement.
INTERVIEW RÉALISÉE PAR
ALEX KIPRÉ
Pouvoirs Magazine