Après une manifestation interdite à Cocody, 32 opposants ont été condamnés à de lourdes peines. La justice frappe fort, l’opposition gronde.
Quarante personnes arrêtées le 11 octobre ont comparu mardi devant le tribunal d’Abidjan pour manifestation interdite et trouble à l’ordre.
Tous affirment qu’ils ne faisaient qu’exercer un droit démocratique dans les rues de Cocody, malgré l’interdiction préfectorale.
Huit prévenus ont su convaincre la cour par leurs témoignages jugés sincères, ils ont bénéficié d’une décision de relaxe immédiate.
Mais pour les 32 autres, le couperet judiciaire est tombé : trois ans de prison ferme et des sanctions complémentaires.
Ces sanctions incluent la perte des droits civiques pendant cinq ans et l’interdiction de séjour à Abidjan pour trois ans.
Le tribunal a précisé que les condamnés disposent d’un délai de 20 jours pour interjeter appel contre cette décision lourde.
Les arrestations avaient eu lieu près du Blockhaus, de Saint-Jean et du carrefour La Vie, foyers visibles de la contestation.
Le 11 octobre, l’opposition appelait à la rue pour dénoncer l’exclusion de ses leaders du scrutin présidentiel à venir.
Parmi les figures exclues : Laurent Gbagbo, Tidjane Thiam et Pascal Affi N’Guessan, tous recalés par le Conseil constitutionnel.
Cette marche interdite avait pourtant mobilisé plusieurs militants, malgré l’interdiction formelle émise par le préfet d’Abidjan.
Ce procès est le second d’une série. Le 16 octobre, une première vague de manifestants avait déjà été lourdement condamnée.
Dans le même temps, la campagne électorale bat son plein avec cinq candidats officiellement en lice pour la présidentielle.
Alassane Ouattara, Jean-Louis Billon, Simone Gbagbo, Henriette Lagou et Ahoua Don Mello sillonnent le pays pour convaincre.
Pendant que certains battent campagne, d’autres paient le prix d’avoir voulu exprimer leur opinion dans la rue d’Abidjan.
L’opinion publique s’interroge. La répression judiciaire et policière ouvre t-elle ou verrouille t-elle l’arène électorale.
Pour rappel, en mars 2023, la justice avait condamné une trentaine de militants du Parti des peuples africains ‑ Côte d’Ivoire (PPA‑CI). A deux ans de prison pour « troubles à l’ordre public ».
Cette répétition montre un schéma où les manifestations interdites sont sévèrement punies. Renforçant la critique d’une justice instrumentalisée.
Les cinq candidats officiels à la présidentielle — Alassane Ouattara, Jean‑Louis Billon, Simone Gbagbo, Henriette Lagou, et Ahoua Don Mélo — poursuivent leur campagne dans ce contexte.
Le verdict frappe dans un climat d’autocensure. Exprimer son désaccord public se paie d’une peine ferme et d’une suspension des droits civiques.
La question demeure . La répression des marches interdites est‑elle proportionnée ou devenue un outil de contrôle politique subtil ?
Les observateurs internationaux et nationaux devront surveiller l’évolution de ces pratiques à l’approche du scrutin du 25 octobre
MARIE GNIALET
photo:dr
POUVOIRS MAGAZINE
