Dans les rues d’Abengourou, les slogans pour la paix se mêlent à une inquiétude que personne n’ose vraiment nommer.
Le 21 mai 2025, le président des Rois et Chefs traditionnels a lancé un appel fort à la nation entière.
Face à des citoyens, Nanan Amon Tanoé a choisi de parler doucement, mais d’appuyer là où ça tremble.
Cinq mois avant le scrutin, son discours invoque l’apaisement.
Dans « apaisé », il y a l’aveu silencieux qu’un climat anxiogène précède toujours ce que l’on rêve de pacifié.
Les cicatrices de 2010 et 2020 rôdent encore dans les mémoires collectives, là où les urnes ont coûté des vies.
Sa tournée, commencée le 5 mai, traverse les 31 régions pour prévenir ces rechutes qu’aucune démocratie ne devrait banaliser.
Les foules, bienveillantes mais lucides, lui répondent avec prudence : elles veulent voter.
« La paix n’est jamais acquise », dit-il, comme s’il conjurait un mal qu’il sait tapi derrière chaque fièvre électorale.
Le ton est grave, les mots choisis avec soin, car chaque phrase pèse autant qu’un souvenir de chaos possible.
À Abengourou, les habitants réclament des élections crédibles, transparentes, mais aussi des garanties réelles contre toute dérive violente.
Ils demandent à la Chambre des Rois de transmettre au Président un message d’unité, d’écoute et de fermeté.
Dans leur bouche, l’espoir d’un vivre-ensemble renforcé sonne comme une supplique, pas comme une formule de campagne vide.
Tanoé appelle les leaders, jeunes, partis, et citoyens à une conscience partagée : construire un pays.
La Chambre entend incarner cette sagesse ancienne, qui rappelle que la paix se protège plus qu’elle ne se proclame.
Son message : « Je donne ma voix pour la paix » – simple, puissant.
Le mot « apaisé » se veut noble, mais il contient l’écho d’un pays qui sait ce qu’il peut perdre encore.
Ce jour-là, à Abengourou, un roi a parlé ; il a demandé la paix – et reconnu la tempête intérieure.
JULIEN BOUABRE
photo:dr
POUVOIRS MAGAZINE