Du 20 au 22, l’Ascad tient un colloque international autour du thème : « Mathématiques: une discipline fondamentale, une efficacité déraisonnable »
Tous les enseignants sont unanimes; il y a un manque d’attrait pour les math a t-on appris lors de cette rencontre qui a déploré cet état de fait.
La Côte d’Ivoire, jadis pionnière en Afrique de l’Ouest dans le domaine des sciences, semble aujourd’hui confrontée à une crise silencieuse mais profonde. Les disciplines scientifiques, notamment les mathématiques et la physique, souffrent d’un déficit criant d’enseignants qualifiés. Cette situation ne résulte pas uniquement d’un manque de ressources humaines. Mais aussi d’une défaillance systémique de la politique éducative nationale
Une politique éducative défaillante :
Depuis les années 1980, la Côte d’Ivoire a investi dans des structures telles que l’Institut de Recherche en Mathématiques (IRMA), dirigé par le professeur Saliou Touré. Pour promouvoir l’enseignement des sciences. Cependant, malgré ces initiatives, les résultats sont décevants.
En 2024, le ministère de l’Enseignement supérieur conduit par Adama Diawara a lancé un recrutement de 34 enseignants en mathématiques et 35 en physique pour les universités d’Abidjan. Mais seulement 4 candidats en mathématiques et 7 en physique se sont présentés, mettant en évidence un désintérêt alarmant pour ces disciplines .
Cette situation reflète un échec manifeste de la politique publique en matière d’éducation scientifique.
La formation et la rétention d’enseignants qualifiés dans les disciplines scientifiques n’ont pas été des priorités pour les autorités compétentes. De plus, les conditions de travail des enseignants, notamment la surcharge des classes et les faibles rémunérations, contribuent à cette crise .
Une responsabilité partagée :
La responsabilité de cette situation incombe à la fois à l’État et à la politique éducative mise en place. L’État, en tant que garant de l’éducation nationale, n’a pas su anticiper les besoins en enseignants qualifiés dans les disciplines scientifiques. La politique éducative, quant à elle, n’a pas intégré les sciences comme des priorités stratégiques, négligeant ainsi leur enseignement dès les premières étapes de la scolarité.
Cette négligence a conduit à une désaffection progressive des élèves pour les sciences. Les programmes scolaires, souvent perçus comme obsolètes et déconnectés des réalités contemporaines, n’ont pas su susciter l’intérêt des jeunes pour ces disciplines. De plus, l’absence de modèles inspirants et de perspectives professionnelles claires dans les domaines scientifiques a renforcé ce désintérêt.
Des conséquences dramatiques :
Les répercussions de cette crise sont multiples et affectent l’ensemble du système éducatif. Dans des établissements tels que le lycée municipal de Taï, des classes entières sont privées de cours de mathématiques et d’anglais en raison du manque d’enseignants. Cette situation compromet gravement le rendement scolaire des élèves et leur orientation vers le secondaire
Au niveau national, cette crise menace la compétitivité du pays sur le plan scientifique et technologique. Les disciplines scientifiques sont essentielles pour le développement de l’innovation, de la recherche et de l’industrie. Le manque d’enseignants qualifiés dans ces domaines compromet la formation des futures générations de scientifiques et d’ingénieurs. Indispensables pour relever les défis du XXIe siècle.
Il est impératif que l’État ivoirien reconnaisse la gravité de cette crise. Et prenne des mesures urgentes pour y remédier. Cela nécessite une révision en profondeur de la politique éducative. Avec une attention particulière accordée à la formation, à la rémunération et à la valorisation des enseignants dans les disciplines scientifiques. Sans une réforme ambitieuse et cohérente, la Côte d’Ivoire risque de sacrifier son avenir scientifique et technologique. Compromettant ainsi son développement durable.
ALEX KIPRE
photos :dr
POUVOIRS MAGAZINE