EXTRAIT DU DISCOURS DE LAURENT GBAGBO AUX ASSISES DES FEMMES DU PPA-CI DU 11 JANVIER AU PALAIS DE LA CULTURE BERNARD DADIE

Je suis heureux de vous voir si nombreuses. Je voulais qu’on échange, qu’on discute un peu, et vous avez répondu à mon appel.
En tant qu’historien, je vais commencer par l’histoire. En 1949, à Treichville, il y a eu des affrontements politiques. À cette époque, le PDC-RDA était dans le collimateur du gouvernement colonial, et le gouverneur s’appelait Pechou.
Tous les grands militants du PDC-RDA ont été arrêtés et emprisonnés à Bassam. Parmi eux, on retrouvait Jean-Baptiste Moquet, surnommé « Jupiter » par les militants, le grand Mathieu Ekra, mon grand-frère Bernard Dadié, Marie Koré, et d’autres.
Ils étaient à Bassam, et les femmes, indignées, ont lancé un appel. Elles ont décidé de ne pas laisser Pechou persécuter les militants ainsi. Se sont rassemblées à l’endroit où se trouve aujourd’hui la gare de Bassam.

Elles ont marché, et ont parcouru un long chemin jusqu’à Bassam pour aller directement à la prison. Ce fut un moment intense, mais cela faisait partie de la lutte. Finalement, elles ont obtenu gain de cause, et les militants ont été libérés.
Je vous parle de ces femmes, qui étaient pour la plupart illettrées. Aujourd’hui, vous connaissez l’effigie de Marie Koré sur les billets de banque, mais elle était illettrée. Pourtant, elle était une combattante, une militante. C’est à elles que nous devons une grande partie de notre liberté.
En 1990, le FPI a décrété que le 30 avril serait la fête de la liberté, et nous avons célébré cette fête en 1991.
. Mais, en 1991, nous n’avions pas un rond pour organiser cette fête.
C’est grâce aux femmes vendeuses d’éponges à Kumasi et à Marcory que nous avons pu collecter des fonds. J’ai donné de l’argent à une dame pour commander des pagnes à Uniwax, et avec la vente de ces pagnes, nous avons pu organiser la fête de la liberté et rembourser les femmes vendeuses d’éponges.

Je veux vous dire cela pour illustrer un point important. Parmi vous, il y a beaucoup de femmes qui n’ont pas eu la chance d’aller à l’école. Elles se sentent parfois complexées. Mais je vous le dis : ne vous laissez pas abattre. Ma propre mère n’a pas été à l’école, mais elle a travaillé dur pour nous permettre à ma sœur Jeannette et à moi-même d’aller à l’école.
Il n’est pas nécessaire d’avoir été à l’école pour réussir. Vous pouvez lutter, vous pouvez vous battre, vous pouvez contribuer à faire avancer ce pays, même sans formation scolaire. Ne soyez pas complexées. Ne soyez pas honteuses. Beaucoup de ceux de ma génération ont grandi dans des familles où les parents n’étaient pas instruits. Cependant, ils ont su nous permettre d’aller à l’école, et nous avons pu réussir.
C’est la preuve que l’éducation est cruciale, mais l’ignorance ne doit pas être un obstacle à l’engagement. Nous devons continuer à lutter contre l’ignorance et la pauvreté. Devons construire des écoles dans chaque village. Multiplier les collèges et lycées pour que tous les enfants puissent accéder à l’éducation, et particulièrement les filles.
En politique aussi, les femmes doivent prendre leur place.
Qui a dit que la politique était réservée aux hommes ?
La politique est la gestion de la société, et tout le monde, hommes comme femmes, a le droit de participer. Les femmes représentent aujourd’hui presque la moitié de la population ivoirienne, et il est inconcevable de les laisser à l’écart.
Je vous encourage à vous engager en politique, à prendre part activement à la gestion de notre pays. Nous devons faire en sorte que les femmes soient de plus en plus nombreuses dans les instances politiques, car elles ont un rôle crucial à jouer dans l’avenir de notre pays.
Je vois des femmes dans des secteurs autrefois réservés aux hommes. Il y a des femmes préfètes, avocates, magistrates, professeurs, institutrices, et dans d’autres métiers. C’est grâce à l’éducation qu’elles ont pu accéder à ces postes. Il est donc impératif de soutenir l’éducation des filles et d’encourager leur réussite.
Je prends aujourd’hui des engagements auprès de vous. Si je suis élu, ma priorité sera de mettre en œuvre l’assurance-maladie universelle. L’assurance-maladie est la gardienne de la vie, et chaque Ivoirien doit pouvoir se soigner. Nous avons déjà voté la loi, mais il faut maintenant l’appliquer pour que tous puissent en bénéficier.
En parallèle, il est essentiel de créer des universités dans chaque région. Et des CHU pour permettre à chacun de se soigner à proximité. Aucun Ivoirien ne devrait être contraint de parcourir de longues distances pour recevoir des soins.
Enfin, l’éducation, la santé et la dignité de nos citoyens sont des priorités.
Il est nécessaire de construire des internats pour permettre aux filles d’étudier loin de chez elles sans obstacles.
Je m’engage à œuvrer pour cela, et j’attends de vous que vous soyez mes messagers. Allez dire partout où vous passerez que Gbagbo vous a promis des lycées, des universités et des CHU dans chaque région.
Êtes-vous prêtes à être mes messagères ? Que Dieu vous bénisse ! »
GBAGBO LAURENT
photos: POUVOIRS MAGAZINE
POUVOIRS MAGAZINE