Après plusieurs succès dont Sans regret, Jacques Trabi revient avec Dr Wlika, une série ambitieuse qui explore les frontières entre médecine moderne et savoirs ancestraux.
Le scénario, signé par la talentueuse Prisca Marceleney, mêle humanisme et questionnements éthiques, pour un récit à la croisée du réel et du spirituel.
Avec Dr Wlika, Jacques Trabi revient là où on l’attendait. Au cœur d’un récit fort, tissé de passions humaines et de regards lucides sur la société contemporaine. Réalisateur confirmé, à qui l’on doit le mémorable Sans regret, Trabi démontre une fois de plus qu’il excelle dans l’art de conjuguer justesse narrative et profondeur émotionnelle. Son regard, à la fois intime et universel, capte les contradictions d’un monde en mutation.
Sans jamais céder à la facilité.
Mais la véritable force de cette série réside sans conteste dans la plume inspirée de Prisca Marceleney. Sortie des fabriques de l’Actor Studio de Sidiki Bakaba. Egalement diplômée de l’École Nationale de Théâtre et de Danse, elle déploie ici tout son savoir-faire. Comédienne aux multiples visages, remarquée notamment dans « Sida dans la cité » (premier rôle cinématographique). Puis dans le rôle d’Aïda dans Moussa Taximan d’Henri Duparc, elle s’impose désormais comme une scénariste de premier plan. On n’est pas étonnée puisqu’elle est aussi désormais autrice avec son roman « Bob Guié, un homme bien ».
À travers Dr Wlika, Marceleney conjugue finesse psychologique et audace stylistique. Sa manière de sonder l’âme des personnages, d’explorer les zones d’ombre sans jugement, confère à la série une dimension presque poétique. Sa coiffure inattendue, tout comme son écriture, symbolise une liberté créative assumée. Une volonté d’être à contre-courant des codes convenus.
COHESION ET RECONCILIATION
Le thème de la médecine, au cœur du récit, se déploie comme une métaphore de la quête de sens et de réconciliation. Dr Wlika interroge la place du guérisseur dans une société écartelée entre science occidentale et savoirs traditionnels africains. Les instruments de la guérison, qu’ils proviennent du laboratoire ou du sanctuaire des tradipraticiens, deviennent les symboles d’un dialogue nécessaire entre deux mondes que tout oppose en apparence. Mais que la série réunit dans une même aspiration : celle de soigner l’être humain dans sa globalité, corps et âme confondus.
Par ce thème universel, Jacques Trabi et Prisca Marceleney signent une œuvre qui dépasse la simple fiction médicale pour devenir une réflexion sur la mémoire, la foi et la transmission des savoirs.
Autour de ce duo complice, la distribution réserve également de belles surprises. Parmi elles, Abou Bassa, père du rappeur Didi B et ancien pensionnaire du Village Kiyi, campe un personnage singulier. Tout en retenue et en intensité. Son interprétation, habitée, apporte une touche d’authenticité brute et rustre à l’ensemble.
Ainsi, Dr Wlika s’impose comme une série ambitieuse, portée par des artisans du cinéma ivoirien qui savent marier exigence et émotion. Trabi et Marceleney signent ici une œuvre qui honore leur parcours. Et confirme leur place parmi les voix majeures de la création audiovisuelle africaine contemporaine.
HARON LESLIE
photo:dr
POUVOIRS MAGAZINE
