Né le 18 octobre 1905, le père de la nation ivoirienne aurait eu 120 ans ce 18 octobre 2025. L’occasion de revisiter son œuvre, ses valeurs et l’influence durable du « Vieux » dans la vie politique ivoirienne.
Ce 18 octobre 2025, Félix Houphouët-Boigny aurait eu 120 ans s’il était encore parmi nous, une date hautement symbolique.
Figure tutélaire de l’indépendance ivoirienne, il a dirigé la Côte d’Ivoire d’une main ferme mais conciliatrice pendant 33 ans.
Fondateur du Parti démocratique de Côte d’Ivoire, il incarne la stabilité, le dialogue et une vision panafricaine assumée et pragmatique.
Premier président de la République, il prôna la paix, le développement et la cohésion nationale comme piliers de l’action politique.
Sa politique d’ouverture et de stabilité attira les investissements, faisant d’Abidjan une capitale régionale moderne et influente.
La fameuse phrase « la paix n’est pas un mot, c’est un comportement » reste gravée dans la mémoire collective ivoirienne et africaine.
Le Vieux laissa un héritage contrasté : stabilité politique, développement économique mais aussi culte de la personnalité très marqué.
La Basilique Notre-Dame de la Paix à Yamoussoukro demeure son monument le plus visible et controversé dans l’histoire du pays.
Mais son pouvoir s’est aussi bâti sur la peur, l’emprisonnement d’innocents et l’élimination de voix critiques et brillantes.
Dans les années 1960, des intellectuels comme Donwahi, Camille, Charles Nokan, Coffie Gadeau furent emprisonnés pour simple divergence politique.
Samba Diarra, Angaté, Nokan furent également victimes d’un système répressif justifié au nom de l’unité et de la stabilité.
Des morts suspectes comme celles de Boka Ernest, Biaka Boda ou Mockey ont jeté l’ombre du soupçon sur son autorité incontestée.
Le parti unique, devenu instrument de pouvoir personnel, étouffait toute opposition au nom de l’unité nationale sacralisée.
Depuis sa disparition en 1993, la Côte d’Ivoire a connu des crises politiques, sociales et militaires qui ont secoué son socle républicain.
Les houphouëtistes revendiquent son héritage, mais les divisions internes ternissent la clarté de leur ligne politique commune aujourd’hui.
Peut-on être houphouëtiste sans le Vieux, quand les valeurs d’unité et de tolérance semblent parfois perdues dans les discours actuels ?
Certains voient dans le retour à ses principes une voie pour la réconciliation nationale et un développement plus inclusif et apaisé.
En 2025, la jeunesse ivoirienne redécouvre Houphouët à travers les livres, archives et débats, entre admiration, critique et questionnements.
Faut-il sanctuariser son héritage ou l’adapter aux réalités d’une Côte d’Ivoire nouvelle, jeune, connectée et en pleine mutation économique ?
Ce 18 octobre, il s’agit moins de commémorer une figure que d’interroger une trajectoire collective encore inachevée et pleine d’enseignements.
Félix Houphouët-Boigny demeure une boussole pour certains, un sujet de débat pour d’autres, mais jamais une page totalement tournée.
JULIEN BOUABRE
photo:dr
POUVOIRS MAGAZINE
