Face aux incertitudes croissantes, les responsables des risques doivent structurer l’agrégation et la priorisation pour éclairer les choix stratégiques.
Dans un monde incertain, les risques évoluent vite. Les organisations doivent anticiper, hiérarchiser et relier les risques à leurs stratégies.
L’économiste Frank Knight distingue le risque mesurable de l’incertitude, qui ne permet aucune estimation fiable des résultats possibles.
Les risques émergents sont nombreux : bouleversements technologiques, instabilité géopolitique, crises climatiques ou tensions économiques mondiales inattendues.
Ces risques ne sont pas isolés. Ils interagissent parfois, entraînant des enchaînements complexes, amplifiant les impacts de manière imprévisible.
Une gestion efficace exige de les anticiper, de comprendre les tendances, et de simuler leurs impacts sur les objectifs stratégiques.
Les institutions financières doivent intégrer la culture du risque dans leur stratégie, avec le soutien actif du conseil d’administration.
Cela transforme la gestion des risques en levier de résilience, mais aussi en source d’avantages compétitifs pour l’avenir.
L’appétit pour le risque : intention noble, application fragile
Les déclarations d’appétit pour le risque sont fréquentes, mais souvent peu liées aux décisions réelles et à la stratégie commerciale.
Un bon cadre d’appétit doit traduire un équilibre concret entre rendement attendu et risques assumés par l’organisation.
Comme un sous-marin connaît sa limite de profondeur, une entreprise doit connaître ses seuils de tolérance au risque définis.
Ces seuils doivent être clairs, mesurables, communiqués, et surtout alignés avec les incitations, les plans et les résultats attendus.
Les indicateurs de risque doivent être en phase avec l’appétit déclaré pour permettre des ajustements en temps réel si nécessaire.
Les 4 étapes clés pour articuler les risques à la stratégie
1. Formaliser une cartographie exhaustive des risques
Un registre des risques compile l’ensemble des risques évalués au sein de l’organisation avec des données claires et mises à jour.
Il doit utiliser une taxonomie normalisée, des échelles communes de probabilité et d’impact, et permettre une visualisation agrégée.
Les risques sont ainsi analysés par type, unité, localisation ou au niveau global de l’organisation selon des critères partagés.
2. Agréger les risques pour une vision d’ensemble
L’agrégation offre une vision consolidée de tous les risques et permet de détecter les effets croisés ou les accumulations critiques.
Elle repose sur des méthodes statistiques, des simulations, des pondérations, ou des scénarios de type « pire cas » ou « somme ».
Une taxonomie commune et des échelles uniformes assurent la cohérence entre entités, filiales ou niveaux hiérarchiques internes.
Une agrégation réussie aide à anticiper les crises, à améliorer la résilience financière et à renforcer la capacité de résolution.
3. Prioriser les risques selon leur criticité
La priorisation repose sur deux critères : la probabilité de survenue et l’impact potentiel sur les objectifs de l’organisation.
Des outils visuels comme les cartes de chaleur permettent une lecture rapide des risques critiques à traiter en priorité.
Les scénarios, les analyses quantitatives et les simulations aident à hiérarchiser les risques selon des données fiables et comparables.
C’est une étape indispensable pour guider l’allocation des ressources limitées vers les domaines à plus haut niveau de risque.
4. Relier les risques à la stratégie de l’organisation
Les risques prioritaires doivent être liés aux objectifs stratégiques pour maximiser l’impact des décisions prises au plus haut niveau.
Cela permet d’ajuster l’organisation, les moyens, ou les incitations afin de minimiser les pertes et maximiser les opportunités.
Il s’agit de transformer la gestion des risques en outil d’aide à la décision et d’orientation stratégique à long terme.
Cette étape demande de concilier vision à long terme et gestion opérationnelle de risques parfois immédiats ou imprévus.
vers une gestion des risques stratégique et proactive
Un directeur des risques efficace doit articuler risques, ressources et stratégie, tout en évaluant l’impact des décisions prises.
Grâce à une approche structurée – cartographie, agrégation, priorisation, alignement stratégique – la gestion des risques devient stratégique.
Elle ne se limite plus à la protection, mais contribue à la performance, à l’agilité et à la croissance de l’organisation.
Camus BOMISSO
Administrateur Indépendant
POUVOIRS MAGAZINE
