Ouattara, fin de 3e mandat: A la croisée de chemins

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 Le troisième mandat de l’indéboulonnable chef de l’État ivoirien prend fin cette année 2025. Et c’est la dernière ligne droite pour l’élection présidentielle du 25 octobre.

Et comme qui veut aller loin ménage sa monture, Alassane Ouattara met les bouchées doubles. Des officiers généraux et préfets hors hiérarchie. Comme le général Touré Apalo Alexandre et l’ex-chef de guerre Tuo Fozié. Admis à faire valoir leur droit, vont rester en activité pour cette année cruciale.
En outre, comme l’heure est grave, il a remis en selle toutes les autorités limogées ou en disgrâce.
Ainsi, Ouattara a créé de nouvelles fonctions de ministres-gouverneurs des quatorze districts autonomes du pays. Juste pour caser celles et ceux sortis du gouvernement.
Mieux, il a rappelé, auprès de lui à la présidence de la République ou du RHDP. Ahoussou Kouadio Jeannot (ex-président du Sénat battu aux élections). Albert Mabri Toikeusse Abdallah (ancien ministre). Et Marcel Amon-Tanoh (ex-secrétaire exécutif du Conseil de l’Entente).
Personne, casseroles ou pas, ne doit rester au bord de la route. Ouattara vient de boucler la boucle avec le retour aux affaires de Jerôme-Patrick Achi.
Démis de ses fonctions le 6 octobre 2023, l’ancien premier ministre est nommé, quinze mois après son départ, ministre d’État, conseiller à la présidence.

Le message est clair: mettre toutes les chances du côté du parti au pouvoir.

Pour réaliser, dans un contexte électoral qui s’annonce relevé et compétitif, le « tako kélé » ou « un coup K.O ».
En même temps, Ouattara laisse penser que toutes les options sont sur la table.
Il reste le plan A du RHDP pour le scrutin présidentiel, mais aucun schéma n’est définitivement acté. Des évolutions, dans l’environnement politique très instable, sont de l’ordre du possible. Ce d’autant que le chef de l’État sortant se retrouve à la croisée des chemins. Au milieu d’interrogations.
D’abord, Ouattara a prêté serment, pour la première fois, le 6 mai 2011. En Afrique de l’ouest, celui qui l’a précédé d’un mois, Mahamadou Issoufou du Niger (7 avril 2011 – 2 avril 2021) est tranquillement parti du pouvoir après deux mandats.
Ceux qui l’ont trouvé à la tête de l’État, ont refusé de tordre le cou à la Constitution à l’effet d’exercer. Malgré des mouvements de soutien en faveur de leur candidature, un troisième mandat. Ce sont: Muhammadu Buhari du Nigeria (29 mai 2015 – 29 mai 2023). Macky Sall du Sénégal (2 avril 2012 – 2 avril 2024). Nanan Akufo-Addo du Ghana (7 janvier 2017 – 7 janvier 2025).
Même Umaru Sissoco Embalò de Guinée-Bissau, arrivé au pouvoir le 27 février 2015, jette l’éponge après son second mandat, qui arrive à terme cette année.

Ouattara se révèle un piètre élève de la démocratie, qui pourrait être tenté de sauver la face.

Ensuite, les envies de rendre le tablier n’ont cessé de le tarauder. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. En créant le poste de vice-président de la République dans la Constitution de 2016, il l’expliquait par sa volonté de passer le témoin. Comme au Nigeria, avant la fin de son mandat en vain.
En mars 2020, il manifesta sa volonté de laisser la place à une nouvelle génération en vain. Car, au décès d’Amadou Gon Coulibaly, choisi comme son dauphin pour lui succéder à la tête de l’État, il est revenu à la charge. Malgré les dispositions constitutionnelles et les troubles électoraux, pour un troisième mandat, « celui de trop ».
C’est pourquoi l’appel à Patrick Achi peut laisser croire à un possible remake de 2020. Cet ancien premier ministre est un homme de dossiers et un brillant technocrate. Depuis l’accession de Laurent Gbagbo à la présidence de la République en octobre 2000, il a exercé toutes les fonctions au niveau de l’Exécutif. Et fait l’unanimité autour de sa valeur intrinsèque. Cerise sur le gâteau, le 1er juillet 2024, il a rejoint un groupe de consultants du FMI et de la Banque mondiale. Mais il faut se garder de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué.

Enfin, Ouattara n’est pas tout à fait le maître du jeu ni de l’horloge.

De nombreux paramètres pendants, comme les crises politico-militaires pour lesquelles Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé notamment ont été jugés à la CPI, restent des épées de Damoclès suspendues. Et il peut être question de sauver le soldat Ouattara.
Ce sont des boulets, qui pourraient justifier, dans le climat d’arrestation et de terreur qui se met en place, le rappel effréné des troupes pour constituer une solide équipe de campagne dans la perspective de 2025. En espérant, par un quatrième mandat tout aussi anticonstitutionnel, reporter à la saint glinglin les éventuelles procédures judiciaires, dont a pâti Hissène Habré au Sénégal et qui donnent le tournis à Nicolas Sarkozy en France, en attendant le procès de Yayah Jammeh en Gambie.
Par conséquent, ce pari ne serait qu’un sursis et non une assurance tous risques.
F. M. Bally
photo:dr
POUVOIRS MAGAZINE

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