L’affaire Baltasar Engonga, qui secoue la Guinée équatoriale, est un scandale complexe.
Il soulève des questions profondes et interconnectées sur les réseaux de pouvoir, les relations de genre, et l’influence de l’argent dans les sociétés politiques modernes. Cette affaire, bien au-delà de sa dimension personnelle et des accusations de fraude, met en lumière des phénomènes systémiques. Lesquels affectent la Guinée équatoriale. Qui affectent aussi, de manière plus large, les sociétés où des hiérarchies de pouvoir et des inégalités de genre s’entrelacent de façon complexe.
Les réseaux de pouvoir : une question de confiance et de manipulation
Le scandale autour de Baltasar Engonga révèle, d’abord, les dérives des réseaux de pouvoir au sein de l’administration publique d’un régime autoritaire. L’homme en question, en tant que Directeur général de l’ANIF, occupe une position clé dans la régulation des finances. Et de la lutte contre la corruption. Sa position de pouvoir lui donne un contrôle considérable sur les finances publiques. Mais aussi sur les personnes qu’il rencontre et avec qui il établit des relations.
Ce scandale montre à quel point les réseaux personnels et les alliances informelles sont essentiels dans de tels régimes politiques.
Baltasar Engonga semble avoir manipulé son autorité pour se rapprocher de femmes influentes. Probablement en vue de s’assurer leur loyauté ou d’étendre son influence. Ce phénomène est symptomatique de sociétés où le pouvoir politique et l’accès aux ressources (matérielles ou immatérielles) sont souvent liés à des relations de dépendance personnelle. Voire à des comportements abusifs.
Le fait qu’on filme ces rencontres et qu’on diffuse les vidéos en ligne, ajoute une dimension supplémentaire à cette analyse. L’affaire reflète l’utilisation des médias et des réseaux sociaux comme instruments de pression ou de manipulation. Manipulation dans un environnement où les relations de pouvoir se jouent non seulement dans les salons privés mais aussi sur la scène publique.
La diffusion de ces vidéos semble aussi faire partie d’une guerre de pouvoir interne. Où la réputation des figures politiques peut être détruite en un instant par un simple partage numérique. Cela soulève des questions sur la vulnérabilité des personnes de pouvoir et les mécanismes de contrôle et d’humiliation qui existent dans des régimes où la transparence est quasi inexistante.
La femme dans les réseaux de pouvoir : entre objectification et instrumentalisation
Ce scandale repose aussi sur une dynamique de genre. Les femmes semblent être à la fois les victimes et les instrumentalistes des réseaux de pouvoir. D’un côté, on observe que les femmes qui apparaissent dans les vidéos sont les épouses de hauts responsables, des figures de pouvoir en elles-mêmes. Leur rôle dans cette affaire interroge sur leur propre autonomie et sur les dynamics de pouvoir qui les placent dans des situations d’objectification.
Si certaines relations semblent être consenties, elles se déroulent néanmoins dans un contexte où les femmes, en raison de leur position sociale, peuvent se retrouver dans une situation de vulnérabilité. Ces femmes sont potentiellement manipulées. Ou contraintes par la position de pouvoir de Baltasar Engonga. Ce qui soulève des questions sur le consentement et la véritable liberté de choix dans un environnement aussi hiérarchisé.
En outre, l’implication de ces femmes, dans un cadre où des personnalités publiques sont directement concernées, questionne le rôle des épouses et des proches des puissants dans l’administration d’un pays. La question est complexe : sont-elles de simples victimes ou des complices? Volontairement ou involontairement impliquées dans des arrangements de pouvoir au détriment de leur dignité ? Dans certains cas, l’engagement dans ces relations peut être perçu comme un moyen de maintenir ou d’accroître sa position au sein du réseau de pouvoir, même si cela les expose à des risques personnels énormes, notamment la réputation.
MARIE GNIALET
photo:dr
POUVOIRS MAGAZINE
