La réforme de gouvernance locale en Côte d’Ivoire : entre ambition et réalité

10 mois

La rentrée politique en Côte d’Ivoire marque un moment clé de réflexion sur l’avenir du pays. Notamment sur la réforme de la gouvernance locale.

Depuis plusieurs années, le président Alassane Ouattara et son gouvernement ont affiché leur ambition de transformer profondément le paysage politique et administratif local. Pourtant, entre les promesses et les réalités de terrain, un fossé semble persister.

La réussite infrastructurelle est indéniable. Le pays est en chantier depuis 10 ans et des acquis se trouvent sous les yeux.

Mais les attentes des citoyens ivoiriens sont là : une demande de proximité, d’efficacité, et de transparence. De même qu’une fin du rattrapage ethnique. Au-delà des résultats, la véritable question est celle de savoir si les réformes engagées sont à la hauteur de ces attentes. Le programme de décentralisation, longtemps brandi comme un pilier de la politique de Ouattara, est censé renforcer les pouvoirs des collectivités locales. Mais pour beaucoup, ce processus reste lent et inégal.

Un processus de décentralisation inachevé

Le projet de décentralisation avait suscité de grands espoirs. En transférant plus de responsabilités aux autorités locales, l’objectif était de rapprocher le pouvoir des citoyens et de promouvoir un développement plus équilibré à travers le pays. C’est fait mais c’est bien au nord, dans le bastion du Rhdp.

Pourtant, de nombreux observateurs notent que ce transfert de compétences est souvent resté lettre morte. Les collectivités locales manquent de ressources financières et humaines pour assumer pleinement leurs nouvelles prérogatives.

Les critiques ne manquent pas. D’Abidjan à Korhogo, en passant par Yamoussoukro, beaucoup dénoncent un manque de volonté politique pour véritablement partager le pouvoir avec les acteurs locaux. « Nous avons les responsabilités, mais pas les moyens de les assumer », confie un maire de l’intérieur du pays, illustrant le décalage entre les discours officiels et la réalité vécue par les élus locaux.

Le gouvernement d’Alassane Ouattara se retrouve donc face à un dilemme : comment poursuivre les réformes tout en maintenant le contrôle nécessaire pour éviter une fragmentation du pouvoir ? Pour certains analystes, la réponse réside dans une approche graduelle et différenciée, prenant en compte les spécificités et les besoins de chaque région. D’autres estiment que seule une refonte complète de la gouvernance locale, incluant une réforme fiscale audacieuse, pourra permettre d’atteindre les objectifs fixés.

Les défis à relever pour un avenir plus décentralisé

Pour véritablement réussir la réforme de la gouvernance locale, la Côte d’Ivoire devra relever plusieurs défis majeurs. D’abord, il s’agira de renforcer la capacité des administrations locales par la formation et le recrutement de personnel qualifié. Ensuite, un cadre juridique clair et transparent est nécessaire pour définir les compétences et les responsabilités de chaque niveau de gouvernement.

Enfin, une meilleure allocation des ressources financières est cruciale. Les collectivités locales doivent être dotées des moyens nécessaires pour développer leurs propres projets et répondre aux attentes de leurs administrés. Cela pourrait passer par une révision des mécanismes de transfert de fonds de l’État central vers les administrations locales.

Vers une nouvelle ère de gouvernance en Côte d’Ivoire ?

Alors que la Côte d’Ivoire s’apprête à entrer dans une nouvelle phase de son développement, la réforme de la gouvernance locale apparaît plus que jamais comme un enjeu central. Si Alassane Ouattara souhaite laisser un héritage durable, il devra transformer les intentions en actions concrètes. Car ce n’est qu’en consolidant les fondations de la gouvernance locale que la Côte d’Ivoire pourra aspirer à un avenir où chaque citoyen, quelle que soit sa région, se sentira pleinement intégré dans le projet national.

JULIEN BOUABRE

photo: dr

POUVOIRS MAGAZINE

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