Sa mère est ménagère. Son père tailleur. Fils d’un styliste traditionnel Gagou donc, Bomou Mamadou est éduqué avec l’envie de repousser les limites qu’on lui fixe. « Choisis n’importe quel métier mais tâche d’être le meilleur dans tout ce que tu fais » lui avait conseillé son père que cet artisan de la parole a tellement écouter au point d’en devenir le Maître. A force d’abnégation. A force de travail qui mène ses pas partout. L’homme est a actuellement en Chine à Pékin pour la célébration des 40e anniversaire de la coopération ivoiro-chinoise. Il proposera un spectacle de danses, de voix et rythmes.
« It’s the man’s world » est pour lui, la meilleure chanson de tous les temps. Musique, texte, voix, orchestration, tout y est parfait. Presque. Ce texte et certainement la voix mais avant les pas de danse de James Brown, son statut de cireur occasionnel comme lui le gonfle d’espoir.
Bomou veut être James Brown ou rien, tout comme Kajeem a voulu être Sonny Okosun ou rien, ou Victor Hugo, Chateaubriand.
Après les années lycées, passés à se trémousser sur des rythmes funk, il fait la rencontre et plus tard la connaissance d’une prêtresse d’art total, Wêrê Wêrê Liking, disposée à construire des jeunes issus de milieux défavorisés. C’est elle qu’il suit au détriment de Marie Josée Hourantier quand survient entre les deux patronnes de la villa kiyi, une fracture comme il en existe dans tous les destins à saveur collective. Il en devient le disciple le plus assidu, le plus travailleur, le plus obsédé aux côtés d’autres tels que Boni Gnahoré, Jonas Zadi. Ensemble ils affrontent le froid canadien, ils accèdent à l’Asie, se frottent à l’Europe de l’est, la France se fait la porte d’à côté. Ils tournent beaucoup en Afrique.
Ils sont la troupe panafricaine de référence de la fin des années 80 et deviennent les meilleurs dans les années 90. Mais s’annonce le syndrome du nid vide, les enfants partent assumer leur destin. Bomou veut être le meilleur. Surtout qu’il l’avait promis à son père, lui, meilleur fabricant de vêtements d’Oumé. Partisan d’art total comme Wêrê-Wêrê Liking, servi par une mémoire rendue fidèle par l’exercice, redoutant le geste inabouti, il finit par savoir tout faire. Il danse, chante, écrit des chorégraphies, il écrit des pièces, les met en scène, campe des personnages à succès au théâtre, se fait acteur aussi au cinéma.
Il réalise des clips portés par des castings fleuves, pour le Village Kiyi, pour lui-même donc. Ses clips portent le sceau de l’audace. Des êtres se vautrent dans la boue, passage obligé pour cueillir les roses du mariage. Cette allégorie est un clin d’œil à son mariage avec Corinne, la cousine de Boni Gnahoré, son collègue pour qui il écrit le clip. Puis Bomou à défaut de 50 albinos, ces êtres géniaux de beauté inscrits sur le scénario, fait monter à cheval une dizaine d’entre eux, dans le clip de Meiway.
Le résultat est lumineux et décident le Jury des « kora » à distinguer le clip de Meiway. Mais de Bomou à la réalité. Comme il lit beaucoup : Sony Labou Tam’si, Césaire, Zadi Zaourou etc, il retient les textes du théâtre africain. Ils deviennent la source nourricière des présentations, des portraits lors de grands rendez-vous. Il devient laudateur quand il est sollicité monnayant rémunérations. C’est d’abord pour chanter le ‘’Tapa’’ étoffe de Miss Zahui, une couturière comme son père. Il perçoit 50000f en Guinée lieu de la cérémonie.
Mais il vient de s’ouvrir les portes de son style d’art qui lui permettra de nourrir sa famille, de se faire respecter de ses collègues. Il devient, de la parole, le maitre et chantera les louanges de maints hommes politiques de gauche comme de droite, des notions qui dans la cité où le ballet idéologique a trop peu de sens. On lui doit des pièces chorégraphiques, la magnifique « Queue du diable » (théâtre), en musique arrangé par Marcellin Yacé, l’album ‘‘N’lelo’’ un refus du miroir déformant de nous-mêmes énoncé par Jean-Paul Sartre avec « L’enfer c’est les autres ». Pour Bomou, l’enfer c’est nous-mêmes…et nos démons intérieurs
ALEX KIPRE
POUVOIRS-MAGAZINE