Le 9 octobre, nous saluons la mémoire de Léopold Sédar Senghor, poète-président, penseur du métissage et homme de renoncement rare qui aurait eu 119 ans aujourd’hui.
Homme d’État raffiné, Léopold Sédar Senghor fut le premier président du Sénégal indépendant qui lui doit sa stabilité politique
Poète de la négritude et humaniste profond, il a mis l’accent sur l’éducation et la culture..
Né en 1906, un an après Félix Houphouët-Boigny, il disputa avec lui le leadership de l’Afrique occidentale française.
Senghor croyait en une Afrique unie, cultivée et métissée, construite sur l’alliance des cultures, non sur leur affrontement.
Son combat pour la négritude ne fut jamais une haine de l’Autre, mais une affirmation digne de la beauté noire.
Dans Chants d’ombre et Hosties noires, il magnifie l’Afrique meurtrie, la mère patiente, la terre brûlée mais fertile.
Son poème Femme noire reste un sommet de sensualité, de fierté africaine et d’élan spirituel vers la beauté originelle.
Pourtant, l’homme qui chanta la femme noire épousa Colette Hubert, Française, amour d’une vie partagée sans reniement.
Ce choix ne fut pas une trahison, mais l’expression intime de sa foi dans le métissage des âmes et des peuples.
À la différence d’autres chefs d’État africains, Senghor choisit de quitter volontairement le pouvoir en 1980.
Ce geste, partagé avec Nelson Mandela, reste l’un des plus nobles de l’histoire politique contemporaine du continent.
Il préféra la transmission à la confiscation, le retrait à l’obstination, la dignité au culte de la toute-puissance.
Senghor fut académicien français, preuve éclatante de son double enracinement et de son génie littéraire reconnu.
Son compagnonnage avec Houphouët-Boigny fut une joute politique cordiale mais tendue, entre vision fédérale et nationale.
Senghor rêvait d’une AOF fédérée, quand Houphouët optait pour des indépendances guidées par l’efficacité pragmatique.
Il croyait au pouvoir des mots, à la paix des idées, à la civilisation du dialogue comme rempart contre la barbarie.
Aujourd’hui, en le saluant, nous saluons aussi une conception rare de la politique, faite de culture, d’éthique et de mesure.
Léopold Sédar Senghor reste un modèle d’élégance politique, d’ouverture d’esprit et de fidélité à une vision de l’Afrique.
Il est juste de se souvenir de lui, ce 9 octobre, non dans le deuil, mais dans l’espérance qu’il a semée.
Hommage à un sage qui fit de la poésie un art de gouverner et du pouvoir une œuvre de civilisation.
Par son verbe et ses actes, Senghor reste une étoile fixe dans le ciel tumultueux de l’histoire africaine contemporaine.
AK
photo:dr
POUVOIRS MAGAZINE
