Le 23 mai, désormais gravé dans nos mémoires, rappelle le prix amer de l’indiscipline et du laxisme quotidien.
Pr Laurence Adonis-Koffy professeure de pédiatrie spécialisée en néphrologie pédiatrique au Centre hospitalier et universitaire (CHU) de Yopougon, son époux directeur général de la Compagnie des Caoutchoucs du Pakidié, Guilain Koffy et leur fils cadet ont été tués dans un accident de la circulation, à Angré-Djibi.
Cinq ans plus tard, la douleur est intacte, mais le silence social face aux causes profondes est toujours assourdissant.
Trois vies fauchées, un matin ordinaire, par une mécanique de l’irresponsabilité devenue trop familière sur nos routes urbaines.
Ils couraient pour vivre mieux ; ils ont rencontré la mort sur un bitume saturé d’absurdités humaines et administratives.
Aujourd’hui, le pays se souvient, mais continue de tolérer ce qui tue : permissivité, folklore et absence de conséquences durables.
Ce n’est pas un accident ; c’est un révélateur d’un effondrement collectif du respect et de la rigueur citoyenne.
Nous avons pleuré, nous avons condamné ; mais avons-nous changé ce qui rend possible de tels drames tous les jours ?
La justice a jugé, sévèrement ; mais le code de la route reste piétiné, quotidiennement, dans l’indifférence la plus absolue.
Des jeunes coupables sans permis et ayant consommé de la drogue mélangée à du chocolat. Oui, mais aussi des systèmes défaillants. Des autorités silencieuses quand une Hyundai Tucson tue. Et une société qui regarde ailleurs

Nous n’avons pas besoin de procès spectaculaires. Nous avons besoin d’un changement structurel, profond, réel et durable. À quoi servent les condamnations exemplaires si les causes, elles, se promènent encore librement dans nos rues encombrées ?Cinq ans plus tard, le 23 mai doit devenir un rappel : plus jamais ça ne doit rester un simple vœu pieux.
La Côte d’Ivoire mérite des routes sûres, des conducteurs responsables, et une justice qui éclaire sans céder à la pression.
Nous rendons hommage à la famille Koffy, en espérant que leur mort serve enfin à transformer notre rapport au civisme.
Une minute de silence ne suffit pas ; il faut une vie entière de responsabilité, pour que justice et sécurité coexistent.
Nous devons désormais refuser que l’émotion remplace la réforme, et que l’oubli enterre les promesses faites dans la douleur.
Chaque 23 mai doit nous réveiller, non pour pleurer encore, mais pour agir, construire, réformer, éduquer et protéger.
Ce n’est qu’à ce prix que leur mémoire pourra reposer en paix, dans une société qui a enfin retenu la leçon.
Ne les oublions jamais. Mais surtout, n’oublions jamais pourquoi ils ne sont plus là parmi nous aujourd’hui.
ALEX KIPRE
photo:dr
POUVOIRS MAGAZINE