Zadi Kessy et Zaourou cités à tort!
La question de l’identité et de la nationalité en Côte d’Ivoire est un sujet délicat qu’on a, à maintes reprises, instrumentalisé à des fins politiques.
Dans un récent article publié en ligne sur Business et Actuality, le directeur de publication aborde ce problème complexe. En se référant aux Thiam et Billon.
Il évoque au passage des figures marquantes comme Zadi Kessy et Zadi Zaourou, en affirmant que leur mère biologique était guinéenne. Cette affirmation, qui semble vouloir jeter une lumière nouvelle sur le débat identitaire en Côte d’Ivoire, soulève en réalité plusieurs questions. Questions sur la responsabilité des médias et la nécessité d’une information rigoureuse.
L’intention du journaliste de sensibiliser les Ivoiriens sur l’importance de dépasser les clivages identitaires est louable. Cependant, il est essentiel de rappeler que les journalistes (et lui avec) se doivent de vérifier les faits rapportés. Car la propagation d’informations erronées, même avec de bonnes intentions, peut aggraver les tensions sociales. En affirmant que les frères Zadi avaient une mère guinéenne, sans preuve solide et en contradiction avec les faits connus, l’article crée une confusion inutile. Et entretient des suspicions infondées.
Il est indéniable que la Côte d’Ivoire a souffert de divisions ethniques. De même que de crises identitaires, exacerbées par des conflits politiques et des manipulations médiatiques. Le pays a traversé des périodes tumultueuses où on a utilisé les questions d’origine et de nationalité pour exclure ou délégitimer certains acteurs politiques. Dans ce contexte, il est crucial que les journalistes respectent leur rôle fondamental : celui d’informer avec précision et impartialité.
La crise identitaire en Côte d’Ivoire; une réflexion sur le rôle des médias et la responsabilité civique
Le cas des frères Zadi illustre bien l’importance de cette rigueur. Marcel Zadi Kessy, ancien PDG de la CIE et de la SODECI, était connu pour son refus de mêler politique, tribalisme ou religion à ses activités professionnelles. Son frère, Bernard Zadi Zaourou, figure intellectuelle et politique de renom, a été marié à une Haïtienne et a œuvré pour une ouverture culturelle et politique. Erigant même une statue en hommage à Toussaint Louverture. Leur parcours montre une ouverture d’esprit et un engagement pour l’unité et la diversité culturelle. Loin des clichés ou des agendas identitaires.
En insinuant qu’ils auraient caché leurs origines, l’article sous-entend une tromperie qui n’a jamais existé. La mère des Zadi est de Soubré et non de la Guinée. Ces informations inexactes risquent non seulement de ternir leur mémoire. Mais aussi de perpétuer des divisions inutiles. Il est fondamental de comprendre que la manipulation de faits historiques et personnels à des fins politiques ou sensationnalistes est dangereuse.
Le journalisme, lorsqu’il est pratiqué avec éthique, est un pilier de la démocratie et de la cohésion sociale. Il a le pouvoir de rassembler, d’éclairer et de pousser à la réflexion. En Côte d’Ivoire, où les questions d’identité ont souvent été des points de rupture, les médias ont une responsabilité accrue. Ils doivent contribuer à l’apaisement des tensions et à la promotion d’une société inclusive et harmonieuse.
Ainsi, plutôt que de relayer des informations non vérifiées ou des spéculations sur les origines des individus, les journalistes devraient se concentrer sur des enquêtes approfondies et des reportages nuancés qui favorisent le dialogue et la compréhension. Ce n’est qu’en adoptant une telle approche que nous pourrons espérer surmonter les défis identitaires. Et construire un avenir plus uni pour tous les Ivoiriens.
ALEX KIPRE
photo: dr
POUVOIRS MAGAZINE