Dans les grands médias ivoiriens tels que la RTI et Fraternité Matin, il est de coutume de s’abstenir de proposer de véritables débats.
Ces médias publics demeurent les instruments dociles des régimes successifs. Diffusant des messages soigneusement calibrés pour ne susciter ni contestation ni controverse.
En contraste, une radio indépendante, Jam, a su s’imposer comme une plateforme audacieuse, non pour un débat de mots. Mais pour un dialogue par l’art et la musique.
Sous la direction éclairée de François Konian, Jam a instauré une forme inédite de débat, dénuée de paroles et de présentateurs. Mais imprégnée de culture et de créativité. Aucun animateur ne dictait les échanges, et pourtant, la station a su revitaliser l’art ivoirien. Redonnant vie à des voix oubliées et négligées. Des artistes comme Chantal Taïba et Joëlle C. ont pu renaître grâce à Jam. Taïba, après des années de silence, a renoué avec son public sous les arrangements de David Tayorault. Et Joëlle C. a vu son œuvre rediffusée avec insistance, faisant preuve d’une nouvelle vitalité artistique.
Jam offrait également une tribune singulière avec son segment “Le Coup de Cœur du Boss”, une forme de consécration artistique. François Konian, ancien bassiste des Souls Guys et producteur de Woya, utilisait cette tribune pour promouvoir des artistes souvent jugés trop audacieux. Ou dérangeants pour les médias traditionnels. Il n’hésitait pas à mettre en avant des groupes comme Garba 50, dont la musique, bien que rudimentaire sur le plan technique, était portée par des textes incisifs et une verve sans retenue. Pour Konian, c’était cela, le véritable débat : un espace où l’art s’exprime librement et où les idées, même dérangeantes, trouvent une oreille attentive.
Les débats orchestrés par Konian étaient bien plus que de simples échanges. Ils étaient des conversations profondes, imprégnées de culture et de réflexion. Par exemple, la diffusion de la voix d’Houphouët-Boigny sur les ondes de Jam. Cette diffusion témoignait de cette volonté de ne jamais dissocier la politique des repères historiques et culturels. Il promouvait des débats authentiques, loin des échanges vains et artificiels qui semblent aujourd’hui régner en maîtres.
Malheureusement, à l’heure actuelle, avec l’émergence de chaînes privées telles que Life TV et NCI, les débats se multiplient. Mais sombrent fréquemment dans la polémique stérile et la surenchère verbale. À l’aube des élections présidentielles de 2025, il devient impérieux de rappeler que le débat véritable nécessite sincérité et ouverture d’esprit. Autrement, la jeunesse ivoirienne risque d’être bernée par l’illusion que la polémique creuse et sans fondement constitue une forme noble de débat.
photo: dr
POUVOIRS MAGAZINE