Portrait: Issa Diabaté, Builder for serial success

2 ans

A force de travail, il s’est fait un nom dans le domaine artistique avec son collègue et associé Guillaume Koffi. Tous les deux viennent de remporter à Lisbonne, le prix du meilleur bâtiment dans la catégorie « Ingénieurie » du World Architecture festival 2022, avec le siège Orange Côte d’Ivoire bâti non loin du Golf hôtel route M’Pouto. Portrait

Basket, jean, chemise ou tee shirt, il est presque toujours décontracté avec un sourire d’affabilité. L’ancien élève de St Paul, puis du Collège Notre dame d’Afrique est aussi un ancien élève de Yale-University (États-Unis) qui sait parler architecture: « J’ai la culture de devoir réussir le maximum avec le minium dont je dispose »ou « On ne vient pas à l’architecture pour de l’argent mais par passion et naturellement l’argent suivra » ou encore«Abidjan est béni de sa géographie et les Ivoiriens devraient se réapproprier les bords de lagune et de mer », et «Je suis rentré de Yale parce que j’ai voulu être utile à mon pays où tout est à construire».  Alors, la jeune génération d’architectes le cite en modèle et à lui, voudrait tant ressembler. Sans réserve. Pour la kyrielle de qualités dont humilité, disponibilité, générosité, courtoisie. Issa est profond. Très riche, brillant, séducteur. L’homme jeune et dynamique d’esprit dégage une belle humanité. L’échec, l’autre nom de la pré-réussite, lui a beaucoup apporté. Deux principaux échecs l’y ont aidé. L’hyper sélectif Bac probatoire d’alors qui a fait des ravages tant dans le camp des mauvais (une évidence) que des bons élèves. Puis un autre échec au baccalauréat. Deux échecs pour préparer à la gestion de succès continus. Né dans une fratrie de 5, il est le fils de deux personnalités. De Lamine Diabaté, rigoureux homme de finance, banquier de renom, Directeur national de la Bceao. Et aussi de l’historienne Henriette Diabaté née Dagry qui deviendra ministre de la culture, politique de poids. Dans ce biotope, Issa parvient à n’être ni le fils de Lamine, ni celui d’Henriette. Pas fils à Papa, ni à Maman non plus, ni musulman, ni chrétien farouchement pratiquant. Mais Issa tout simplement ayant foi en dieu et en l’exercice de ce qu’on aime. Dès 4 ans, il aime à tenir le pinceau. À 12 ans, il voulait être architecte. Il a de qui tenir tant le sang artistique ruisselle dans les veines maternelles. Bien des Dagry sont artistes : Honoré (peintre), Alain (plasticien), Lucie (chorégraphe, danseuse, comédienne), Mandy (décoratrice d’intérieur), Pétrus (le grand père, photographe), Edmond (photographe), Paul (musicologue). Issa est déjà designer, et dessinateur d’architecture. Mais c’est officieux. Après la Côte d’Ivoire, il est envoyé en France puis aux Etats-Unis car Lamine Diabaté, banquier, a davantage foi au système anglophone qui le fera bon banquier comme lui. Aux États-Unis, il suit des cours de finance et obtient une licence pour faire plaisir à Papa qui rêve d’en faire un brillant banquier ou homme de finance. Mais Issa veut être architecte. Or un architecte, ça ne gagne pas bien sa vie. À cet argument paternel, le fils répond qu’il préfère être un bon architecte qu’un piètre homme de finance. Homme de caractère, le père ne peut qu’abdiquer devant un tel argument d’aussi belle facture. Surtout qu’il a passé sa vie à inculquer à sa progéniture de se battre pour obtenir ce qu’elle veut. Et ce que veut Issa, c’est être architecte. Sur présentation de dossier, il intègre Yale University. La prestigieuse école fondée en 1701 pour fabriquer l’élite et d’où ne sortent que des perfectionnistes et des guillotineurs de l’échec. Deuxième plus riche université du monde derrière Havard sa rivale, avec une dotation de 12000 milliards de Francs Cfa, elle possède également plusieurs bibliothèques qui regroupent au total plus de 11 millions de livres et s’articule en 10 écoles professionnelles riches de 11000 étudiants. Le jeune Issa intègre celle qui forme depuis 1972, la crème des architectes du monde et qui a formé le célèbre Norman Foster, bâtisseur britannique âgé de 80 ans aujourd’hui. Issa peut se vanter également d’avoir fait la même école que les politiques Bill et Hillary Clinton, George Herbert Walker Bush, Gerard Ford, les cinéastes Paul Newman, Jodie Foster… bref d’avoir reçu la même formation que les meilleurs. De 1991 à 1993, Issa Diabaté effectue des séjours de stages au sein de différents cabinets d’architecture en Côte d’Ivoire (Goly Kouassi), aux Etats-Unis (Dureaux and Purnell) et en France (Jean Nouvel et Catani) où il participe notamment au concours pour la cité judiciaire de Nantes. Pendant ces séjours en terre ivoirienne, son frère utérin, Jean Philippe Kaboré, anciennement directeur de 3A Télésud, et actuel Secrétaire exécutif du CNM-TNT, l’invite à se rapprocher de l’un de ses amis, Guillaume Koffi, architecte comme lui et qui se cisèle une réputation sur la place ivoirienne. Dès le premier contact, ils partent tous les deux sur un chantier. Depuis, ils ne se sont plus lâchés d’une semelle et leurs pas continuent d’en sillonner. En mai 1994, Issa, titulaire d’un master d’architecture, rejoint le cabinet SAU Guillaume Koffi en tant que stagiaire, y revient en 1995, en qualité de Chargé des projets architecturaux. En 2001, il devient l’associé de Guillaume Koffi avec la création de Koffi & Diabaté Architectes. Ils sont tous deux, les architectes stars de Côte d’Ivoire. Abidjan leur doit les sièges de Bridge Bank et de Versus Bank, la mosquée du Plateau, l’hôtel Onomo de l’aéroport. Orange leur a confié la création de leur siège digne de ce nom. Ils en ont profité pour avoir un prix au Portugal. Issa est architecte politique. Pas au sens niais où il construirait des édifices pour des politiques, mais politique parce qu’il propose un renouvellement de ce métier, et des mesures citoyennes. En 2016 par exemple, pour le logement, il livrera une cité résidentielle baptisée ‘‘ Les résidences Chocolat’’ qui réussira là où a échoué et échoue le politique. Des résidents d’appartements et de villas basses sans clôture sur la même empreinte géographique et partageant le même parking souterrain, le même plein air, le même personnel, le jardinier par exemple, faisant la police ensemble. Des résidents qui n’auront pas le droit de modifier quoi que ce soit sur cet espace. Parce que l’Ivoirien a appris à se méfier de l’autre, il faut briser de mur de méfiance et de haine pour réapprendre à s’accepter. Y a-t-il meilleur proposition d’applicabilité du vivre ensemble, de la réconciliation, du désarmement des cœurs, du gommage des différences ? Mettre sur une même empreinte géographique des couches sociales différentes a toujours été la devise de cet homme qui cite Abobo-Baoulé, Génie 2000, Adjouffou comme des modèles d’habitats. Cet homme qui a toujours fait le choix de vivre en appartement, de porter des Jeans. Simplicité ? Non. Commodité car en dehors des chantiers, bretelles, chemises blanches anglosaxonnes signées, mocassin de valeur lui vont à merveille et achèvent de le rendre séducteur, tout comme sa villa à Assinie ou son parler quasi-parfait ou sa silhouette qu’il sait laisser trainer dans les expos de ses collègues designer, plasticien, à des concerts de musique aboutie, par solidarité. Issa dit bonjour à Jean Luc Bédié, comme il le dirait à moi, à X : avec courtoisie. Toujours ! Et ni les prix « Robert Allen Award » en 1995 aux Etats-Unis et en 1998 de meilleur designer de la biennale de Dak’art en 1998, ni la brillante participation au Design Indaba 2014 en Afrique du sud de ce designer ne lui montent pas à la tête. Il a l’impression de faire le même métier.

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